Sous un voile permanent de poussière dans les airs
Les sourires édentés et rougis par la noix de bétel, les sourires blancs réguliers, les visages bruns maquillés de thanaka, les yeux des Birmans, Chans, Palaungs ou Pa-o brillent.
Ici, c’est le dur labeur de tous sous le soleil, dans la chaleur et sous un voile permanent de poussière dans les airs. C’est le dur labeur d’un pays pauvre et fermé depuis tant d’années de dictature militaire et de conflits armés. Les femmes et les hommes chantent, rient, et sourient dans les champs quand ils coupent la canne à sucre à la machette, ou sur la route en portant de vieux bidons rouillés de goudron fumant pendouillant à un pneu fatigué, lui-même accroché à un rondin tout pelé.
Et le soir, ils chantent encore à tue-tête, entassés à l’arrière de vieux pick-up toussotants qui sautent sur les routes cabossées que les travailleurs de la route n’ont pas encore inondé de leur sueur, ou alors il y a longtemps.
Sous leurs chapeaux de paille les travailleurs de la route s’avèrent être bien souvent des travailleuses. Toutes petites, frêles, parfois adolescentes, la tête emmitouflée dans des tissus servant à les protéger de la poussière des routes, les vêtements poussiéreux et trop chauds pour cette fournaise, elles trient les gravillons au tamis qu’elles manipulent à deux. Un tas de très gros, de gros, de moyens, de petits graviers qu’elles porteront tout au long du jour d’un point à un autre sur leur tête délicate en papotant et bien souvent en riant.
D'autres porteuses de cailloux font des allers-retours
Les gens ici sont étonnants, courageux, généreux. Pour la plupart, ils n’ont rien de ce que nous avons, pas de route correcte, pas de bagnole, pas de télé, ni d’ordi, pas de salle de bains, pas de cuisinière ni de four, pas de poussette, pas de matelas et encore moins de lit, pas de lampe torche frontale, pas d’appareil photo ni de portable, parfois pas d’eau courante, ni d’électricité 24 heures sur 24, pas de spécialistes en tout genre, pas de jeux électronique, pas de robot à râper, à couper, à trancher, à pétrir, à mélanger, pas de machine à laver ni à aspirer.
Mais ils possèdent en abondance au moins deux choses précieuses que nous n’avons pas, ou que nous n’avons plus, ou peut-être sous forme de miettes au fond d’une boite à jouets oubliée au fond du garage. Ils possèdent l’art d’accrocher un sourire à leurs lèvres pour l’adresser à l’étranger de passage et l’art de la générosité et de l’hospitalité envers l’inconnu.
Moi, ça me fait réfléchir... et sourire ... et rire
Bise
Aline